Entraînement des sportifs : "Aucun aliment n'est à exclure totalement de l'alimentation"

Le Dr Alexandra Malgoyre, médecin chercheur à l’Institut de Recherche Biomédicale des Armées, lève le voile sur l’alimentation des sportifs et nous livre ses conseils, à l’occasion de sa conférence “L’entrainement commence à table“ qui se déroulera du 26 au 28 septembre 2013*.

Une conférence sur l'alimentation du sportif, menée par le Dr Alexandra Malgoyre, se tiendra le 27 septembre 2013.

Quel régime faut-il suivre quand on pratique un sport ?Dr Alexandra Malgoyre : Le régime du

sportif repose tout d’abord sur une

alimentation quotidienne équilibrée, mais qui doit prendre en compte les besoins particuliers liés aux séances d’entraînement. Ces besoins sont d’ordre quantitatif, les séances d’entraînement conduisant à une augmentation des

besoins hydriques et énergétiques quotidiens, évidemment très variables en fonction de l’intensité et de la durée des séances. Ils peuvent s’élever à 1 litre d’eau par heure d’entraînement et de 500 à 1 000 kcals par jour chez les individus très actifs. L’exercice physique s’accompagne également de besoins qualitatifs spécifiques, en particulier une augmentation des besoins en glucides complexes dits “lents“.Contrairement à ce qui est communément admis, même les sportifs d’endurance ont des besoins protéiques accrus par rapport au sujet sédentaire. Pour un homme sportif de 70 kg, on préconisera un minimum de 85 g de protéines de bonne qualité quotidiennement sans dépasser 150 g par jour. Des apports minimum en lipides doivent aussi être préservés sous peine de développer des états de fatigue chroniques. On veillera à l’apport en acides gras essentiels à travers les huiles végétales de type colza et noix, la consommation de petits poissons gras comme les harengs, les sardines ou les maquereaux, et d’oléagineux comme les amandes.Quel est le type de régime le plus fréquemment adopté par les sportifs ?Dr A. M. : Il faut ici distinguer ce qui est recommandé et ce qui est pratiqué dans les faits. Par rapport aux recommandations édictées pour le sujet sédentaire dans le

Programme National Nutrition Santé, la proportion de glucides doit être augmentée de 5 à 10 % par rapport à ce qui est recommandé. Les apports protéiques, exprimés en pourcentage des apports caloriques totaux, restent relativement stables alors que la part représentée par les lipides sera un peu diminuée.En pratique, quelques règles diététiques simples et de bon sens permettent d’atteindre ces objectifs. Ceci passe avant tout par une alimentation structurée au cours de la journée avec une répartition des apports caloriques en 3 ou 4 repas. Enfin, le meilleur garant de l’équilibre alimentaire reste la variété et la diversité alimentaire : assurer à chaque repas principal la fourniture de 4 ou 5 composantes de chaque famille alimentaire, à savoir

légumes crus ou cuits,

viande ou

poisson ou

œuf, farineux ou légumineux,

produit laitier,

fruit cru ou cuit, pain. Pour les collations, qui doivent être clairement distinguées d’un grignotage sucré, un produit laitier, un fruit, éventuellement un produit céréalier, et de l’eau. Chez le sportif, les erreurs nutritionnelles les plus fréquemment observées sont des rations trop pauvres en glucides complexes, en fruits et légumes et trop riches en protéines et en

graisses.Quelle sera la recette nutritive de demain pour les sportifs ?Dr A. M. : En dehors des compétitions, une alimentation équilibrée composée d’aliments naturels et variés est tout à fait suffisante pour répondre aux besoins quotidiens du sportif amateur. Le recours à tout complément alimentaire n’est absolument pas nécessaire et les supplémentations systématiques peuvent tout au moins s’avérer inefficaces voire dangereuses. C’est le cas pour les antioxydants dont la prise immodérée à l’issue des séances d’entraînement pourrait retarder la mise en place des adaptations musculaires.Le problème est différent pour les compétitions, en particulier lors des épreuves de longue durée à étapes pour lesquelles les participants sont de plus en plus nombreux, si l’on en croit l’augmentation exponentielle du nombre de “trails“ recensés par la Fédération Française d’Athlétisme. Ces épreuves posent de véritables challenges en termes de nutrition et de réhydratation. Le paradoxe étant que si les lipides sont de très loin les aliments à plus haute densité énergétique, avec plus de 9 kcal par/g de lipide contre à peine 4 kcal/g pour les glucides, ils sont malheureusement difficilement utilisables par les muscles en particulier pour des exercices intenses. Bien qu’essentielle à la performance, la compensation de la dette énergétique et hydrique de l’épreuve est souvent difficile dans le cours laps de temps de récupération avant l’étape suivante, d’autant que ces épreuves extrêmement fatigantes sont souvent anorexigènes.Un aliment appétant, à haute densité énergétique et facilement utilisable par le muscle serait donc l’idéal, mais cet aliment “miracle“ n’existe évidemment pas. Des recherches s’intéressent néanmoins à certaines familles d’acides gras qui pourraient être capables d’activer leur propre utilisation par les muscles. Mais à l’heure actuelle, seuls des activateurs synthétiques se sont avérés suffisamment puissants pour augmenter notablement l’utilisation des graisses. Mais nous sommes là dans le domaine du dopage et plus dans celui de la nutrition.Quelle est l’alimentation quotidienne idéale pour se mettre au sport ?Dr A. M. : A priori, aucun aliment n’est à exclure totalement de l’alimentation, hormis dans les cas particulier des

allergies alimentaires avérées.  Certains aliments seront toutefois consommés avec parcimonie. Il ne faut pas oublier que des dogmes alimentaires trop stricts peuvent aussi conduire à des drames humains quand ils sont véhiculés par des parents ou entraîneurs peu scrupuleux à des jeunes filles en plein développement pubertaire et adeptes des sports où l’image corporelle présente une haute importance.En général, on évitera la consommation excessive de pâtisseries, charcuteries, et en dehors des périodes de compétition, la consommation de boissons sucrées, l’eau restant la seule boisson nécessaire au quotidien. Entre deux aliments à composition identique en glucides, on préfèrera le plus riche en micronutriments (vitamines, minéraux et oligoéléments). Aussi, on préservera un apport en crudités et fruits frais quotidien. Et on n’hésitera pas à rajouter un jus de citron sur une salade de lentille, ce qui apportera de la vitamine C et augmentera l’absorption du fer contenu dans cette légumineuse. Les coquillages et crustacés sont aussi une source intéressante de zinc et d’iode.Certaines eaux minérales peuvent compléter l’apport en calcium et magnésium de l’alimentation solide. Le lait demi-écrémé, source de protéines de bonne qualité, de glucides, riche en calcium est aussi un excellent aliment pour le sportif, juste après une séance de musculation, ou sucré en récupération d’un effort endurant. Les produits “fortifiés“ par l’industrie agro-alimentaire peuvent également se révéler utiles comme les laitages enrichis en vitamine D, naturellement absente des produits laitiers, et qui participe à la prévention des déficits saisonniers fréquents sous nos latitudes.*“L’entrainement commence à table“, conférence du Dr Alexandra Malgoyre, le 27 septembre 2013 à 14 heures au Palais des congrès de Paris, dans le cadre des Entretiens de Bichat (pour plus d’informations, consulter le site

www.lesentretiensdebichat.com)Source Relaxnews